jeudi 21 août 2014

Le Médisant


La vie est comme un arc en ciel. Il faut de la pluie et du soleil pour en voir les couleurs.
Jules Renard
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 Si vous ne pouvez pas être positif ici, allez être négatif ailleurs. 

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C'est pourquoi je vis un jour à la fois, celui qui est le 1er jour de ceux qui me restent à vivre.



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Le commérage est l'excitation d'un vide intérieur. Mais il peut aussi être absurde et cruel. C'est facile de condamner sans penser aux implications que cela comporte. Le commérage, s'il n'est pas positif, peut détruire quelqu'un. Alors attention avec les potins.
LE MÉDISANT : IL SE REMPLIT DU MONDE EXTÉRIEUR POUR NE PAS 
SENTIR QUEL POINT IL EST CREUX...
« QUESTION : Jaser de son prochain peut nous aider à nous révéler à nous-mêmes et nous apprend beaucoup de choses concernant autrui. Sérieusement: pourquoi ne pas se servir des commérages pour découvrir ce qui « est »? Les mots « potins » ou « cancans » ne me font pas peur du fait qu ‘on les condamne.
Krishnamurti : Je me demande pourquoi nous potinons. Ce n’est pas parce que les autres se révèlent ainsi à nous. Et pourquoi devraient-ils se révéler à nous? Pourquoi voulez-vous qu’ils se révèlent à vous? Pourquoi cet extraordinaire intérêt pour les affaires d’autrui? C’est une forme d’agitation, n’est-ce pas? C’est le signe d’un esprit tourmenté. Pourquoi se mêler de ce que font les autres ou de ce qu’ils disent? L’esprit qui potine est bien superficiel ; sa curiosité est mal dirigée. Vous avez l’air de penser que les autres se révèlent à vous du fait que vous vous mêlez de connaître leurs actions, leurs pensées, leurs opinions. Mais pouvons-nous les connaître lorsque nous ne nous connaissons pas nous-mêmes? Pouvons-nous les juger si nous ne connaissons pas le mode de notre pensée et notre façon d’agir et de nous comporter? Ce désir de savoir ce que d’autres pensent et sentent, et de bavarder à ce propos, n’est-ce pas une évasion, une façon de nous fuir nous-mêmes? N’y a-t-il pas là en outre le désir d’intervenir dans la vie des autres? Notre vie n’est-elle pas assez difficile, complexe et douloureuse telle qu’elle est? Et d’ailleurs, au cours de ces bavardages cruels sur les gens, avons-nous le temps de penser à eux? Pourquoi le faisons-nous? Or, tout le monde le fait: on peut dire que la médisance est un fait général.
Je pense que, tout d’abord, si nous parlons tellement d’autrui c’est parce que notre propre processus de pensée et d’action ne nous intéresse pas suffisamment. Nous voulons savoir ce que font les autres et, peut-être – pour m’exprimer charitablement – les imiter. En général, si nous potinons, c’est pour les condamner ; mais en élargissant ce fait charitablement, admettons que ce soit aussi pour les imiter. Pourquoi voulons-nous imiter? C’est parce que nous sommes extraordinairement creux. Nos esprits sont si émoussés qu’ils sortent d’eux-mêmes pour aller chercher des excitations.
En d’autres termes, la médisance est une sensation ; on y trouve toujours le désir d’exciter l’esprit et de le distraire. Si l’on examine profondément cette question, on revient forcément à soi-même et l’on voit alors combien creux l’on est, pour aller ainsi chercher des excitations au-dehors en parlant d’autrui. Surprenez-vous en train de potiner la prochaine fois que cela vous arrivera, et ce fait vous apprendra énormément de choses sur votre compte. Ne le déguisez pas en disant que vous avez une curiosité d’esprit, et il vous révélera au contraire que vous n’avez pas un réel et profond intérêt pour les personnes, et que votre esprit agité n’est qu’à la recherche d’une excitation pour combler son vide intérieur.
Le problème suivant est: comment mettre fin à ces bavardages? Lorsque vous vous rendez compte que vous jasez à tort et à travers de votre prochain, que c’est devenu une fâcheuse habitude, comment vous arrêter? Cette question se pose-t-elle vraiment?
Si vous êtes réellement conscient de tout ce que comporte et de tout ce qu’implique votre action, vous demandez-vous comment la faire cesser? Ne cesse-t-elle pas toute seule? Le « comment » ne se pose pas du tout. Il ne se pose que lorsqu’on n’est pas lucide et la médisance est un indice qu’on ne l’est pas. Faites-en l’expérience vous-même et vous verrez combien vite vous cesserez de jaser dès que vous vous rendrez compte de ce que vous êtes en train de dire. Si votre langue va son train, il n’est pas nécessaire de faire un effort de volonté pour l’arrêter ; il suffit que vous preniez conscience de ce que vous dites et de ce que cela implique. Vous n’avez nul besoin de condamner ou de justifier votre cancan ; prenez-en conscience et vous le verrez aussitôt s’arrêter parce qu’il vous aura révélé votre mode d’agir et de vous comporter, ainsi que le façonnement de votre pensée ; en cette révélation, vous vous découvrirez vousmême, ce qui est beaucoup plus important que d’émettre des opinions sur ce que font et pensent les autres.
La plupart d’entre nous, qui lisons les quotidiens, sommes bourrés de potins, de potins mondiaux. C’est une façon de nous évader de notre mesquinerie, de notre laideur.
Nous pensons que cet intérêt superficiel que nous accordons aux affaires du monde contribuera à nous donner la capacité et la sagesse de diriger nos propres vies.
Nous sommes si vides, si creux intérieurement que nous avons peur de nous-mêmes et les potins à grands tirages nous offrent une fuite dans des divertissements sensationnels.
Ce vide profond, nous essayons de le remplir de connaissances, de rituels, de potins, de réunions. L’évasion devient suprêmement importante et non la perception de ce qui « est ». Cette perception exige de l’attention ; voir que l’on est vide et désorienté demande une sérieuse attention ; aussi préférons-nous les évasions: elles sont tellement plus faciles et agréables ! Lorsqu’on se connaît tel que l’on est, il devient très difficile de savoir comment se comporter vis-à-vis de soi-même, car ce problème s’impose alors à nous et nous ne savons pas comment le traiter. Lorsque je sais que je suis vide, que je souffre, que je suis désemparé, ne sachant plus que faire, j’ai recours à toutes sortes d’évasions.
La question est: que faire? Nous ne pouvons pas nous évader ; tenter de fuir est absurde et enfantin. Lorsque nous nous trouvons ainsi face à face avec nous-mêmes, que devons-nous faire? Tout d’abord, est-il possible de ne pas nier ou justifier ce que nous sommes mais de demeurer avec « cela » tels que nous sommes? C’est extrêmement difficile car l’esprit cherche tout le temps des explications, des condamnations et des identifications. S’il ne fait rien de semblable mais demeure avec ce qu’il perçoit, cela revient à dire qu’il l’accepte. Si j’accepte le fait que j’ai la peau brune, c’est la fin du problème ; le problème commence lorsque je veux changer de couleur. Accepter ce qui « est » est très difficile ; et cela n’est possible que lorsqu’il n’y a pas d’évasions ; et condamner ou justifier est une fuite.
Or il arrive que, comprenant tout le processus de notre médisance et voyant à quel point il est absurde, quelle cruauté et quelles nombreuses implications il comporte, nous demeurions avec ce que nous sommes, et le « traitions » soit pour le détruire soit pour le métamorphoser. Si, ne faisant rien de tout cela, nous pénétrons dans la perception de notre comportement avec l’intention de le comprendre, d’être uni à lui complètement, nous voyons que ce qui « est » n’est plus ce que nous redoutions et qu’il y a dès lors une possibilité de le transformer.»
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Extrait de « La première et dernière Liberté »

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